SUPERGRASS : Diamond Hoo Ha (chronique, 2008)

Publié le par Systool

Quinze ans que les bourdonnants SUPERGRASS nous assènent des albums délicieusement punchy. Ca fait une paie! Alors que la précédente livraison montrait des signes de « maturité », la bande à Gaz Coombes revient avec Diamond Hoo Ha, une collection de onze titres à la rage juvénile totalement assumée. Enregistré dans le studio Hansa de Berlin, celui-là même qui a vu la naissance du triptyque LowHeroes - Lodger de Bowie, le sixième album de nos herbivores favoris met en exergue les mélodies adolescentes qu'on était en droit d'attendre, mais aussi quelques pépites aux intonations plus 70's. Après le départ tonitruant de Diamond Hoo Ha Man, très proche d'une composition de WHITE STRIPES, on poursuit avec la wah wah vrombissante de Bad Blood. Le groupe enchaine avec un titre plus posé, que le Thin White Duke – justement – n'aurait pas renié. Le refrain de Rebel in you est quelque peu énervant, mais le quatuor se rattrape avec une conclusion aux choeurs moelleux. Le piano est encore de mise sur When I needed you, une composition au rythme moins frénétique qu'à l'accoutumée. C'est un peu le constat de Diamond Hoo Ha : une alternance entre des bombes souvent très efficaces mais manquant parfois d'un peu de panache (345) et de titres plus langoureux comme The Return of Inspiration qui, malgré un couplet tout ce qu'il y a de plus sympathique, s'embourbe dans un refrain pataud.

 

 

 


Heureusement, la basse élastique et le tempo groovy de Rough Knuckles relèvent le niveau. Ce n'est pas le refrain digne de Goldorak ou le solo spatial de clavier qui me contrediront. De toute façon, tout le monde le sait, mais la musique de SUPERGRASS est au rock ce que Patrick Dempsey représente pour la gente féminine adolescente : une entité sexy et mal rasée, la fusion nucléaire de Marc Bolan et des WHO. L'électro-acoustique Ghost of a Friend a la particularité de présenter un chant pastichant l'ami Dylan, tandis que Whisky & Green Tea, comme le prédit son titre, est une façon amusante de célébrer l'amitié sino-britannique en ces temps de « boycottage olympique ». Son introduction m'évoque la reine d'Angleterre imitant un morse au moyen de baguettes chinoises en guise de défenses, tournoyant comme dans une animation de Gilliam pour les Monty Pythons. Vous voyez le tableau? En d'autres termes – plus musicaux – le trio nous balance un riff surpuissant sur fond de cuivres free jazz, entrecoupés par des chinoiseries vocales. On revient à un rock plus adulte avec Outside, teinté des vapeurs du glam et porté à mi-course par le clavier lancinant de Rob Coombes, le frérot de Gaz qui a officiellement rejoint la formation en 2002, à l'occasion de la sortie de l'excellent Life on other Planets. Butterfly, avec son ambiance plus sévère, clôt les débats de très belle manière. Le fantôme de Bowie semble encore planer sur cette composition audacieuse et aux multiples facettes, le quatuor n'étant pas le moins du monde embarrassé à l'idée d'accoler une rythmique martiale à un intermède à la naïveté désarmante.


Souvent irrésistible, faisant preuve d'un goût certain, Diamond Hoo Ha montre néanmoins quelques faiblesses. Le talent de SUPERGRASS n'est plus à prouver. On sait bien que ces gaillards sont passés maîtres dans l'élaboration d'une musique à la fois pêchue et résolument listenable, mais je ne peux m'empêcher d'éprouver la sensation que par moments, Gaz naturel et ses amis forcent le trait au point de mettre dangereusement en évidence les rouages de leur si belle mécanique. Il s'agit, il faut bien le dire, de la remarque typique qu'un professeur ferait à son plus brillant élève lorsqu'il rend une copie largement au dessus de la moyenne, mais inférieure à ses travaux habituels. Il serait cependant dommage de passer à côté, surtout quand on voit les daubes que certains veulent nous faire gober.

 

 

 

SUPERGRASS – Diamond Hoo Ha (Parlophone, 2008)

 

 

 






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La chronique de l'album sur PLANET GONG

 

 

Publié dans Rock

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S
D : Oui, oui, j'avais bien compris, D! J'espérais que les élèves discutés dans d'autres articles livreront une meilleure copie ;-)
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D
C'est peut-être seulement la fatigue, mais ta réponse me fait douter d'avoir été clair... et je me méfie des malentendus vite arrivés sur le web.Quand je dis : "je crois que je vais attendre que le brillant élève rende une copie de son niveau (l'extrait choisi ne me parle pas, j'avoue)", je parle de Supergrass en reprenant ta propre formule. Je ne parle pas du tout de toi. Ou alors c'est moi qui ne comprend pas la réponse... La fatigue, je te dis... Tu me prescrirais quelque chose ? :-)Bon week-end doc' (enfin si c'est un week-end  pour toi...)
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D
Hello doc :-)J'espère que tu vas bien. Toujours dans le Jura ?Pour Supergrass, je crois que je vais attendre que le brillant élève rende une copie de son niveau (l'extrait choisi ne me parle pas, j'avoue)... mais vrai plaisir de lire ton article.
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S
<br /> Oui, toujours dans le Jura... j'y suis pour une année!<br /> <br /> Jette seulement un oeil aux articles plus récents, sans doute les arguments seront plus percutants!<br /> <br /> <br />
M
Coucou Systool ! Merci pour ton petit mot sur mon blog. Je constate que l'on parle toujours chez toi de bonne musique, ce qui me fait regretter de ne pas avoir assez de temps pour passer plus souvent. Mais tu es toujours dans mes favoris !Bonne continuation à toi et à très bientôt.
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S
<br /> Hello Maydrick! Merci d'être passé à ton tour ;-)<br /> <br /> A bientôt<br /> <br /> <br />
T
Tout à fait d'accord avec toi sur tous les points. J'irai même plus loin que toi pour Vampire Weekend & Foals. Ce sont pour moi deux groupes qui ne servent à rien. Leur musique n'est rien d'autre que de la réchauffée de resucée, sans la moindre once d'originalité, au contraire des Supergrass qui ont réussi à s'approprier et à faire leur, entre autres, un héritage "ramonesque". Vampire & Foals ont simplement la chance de bénéficier d'un méga buzz. Ce qui fut un peu le cas, en Angleterre, du moins, à la sortie de "I should coco" (j'y étais :-)), pour Supergrass qui, eux, sont toujours là 13 ans plus tard. Dans 2 ans, que seront devenus Foals & VW une fois que le NME, Pitchfork & consorts auront trouvé d'autres hypes ?Contrairement à ces deux groupes, l'intérêt médiatique consacré aux Last Shadow Puppets me semble entièrement justifié. Et pourtant, je suis loin d'être fan des Arctic Monkeys & des Rascals...@++
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S
<br /> Je constate avec plaisir que tu es à ton tour d'accord avec moi. Maintenant, je vais jeter une oreille à ces Puppets, ça m'intrigue! ;-)<br /> <br /> <br />