Bret Easton Ellis : Less than Hero

Publié le par Systool

Né à Los Angeles en 1964, Bret Easton Ellis a su s’imposer en quelques romans comme l’un des auteurs contemporains américains les plus médiatisés et dérangeants. Son premier essai, Less than Zero (Moins que zéro), écrit à l’âge de 20 ans pour un concours littéraire dans sa fac, attire bien vite l’attention de certains spécialistes qui voient en lui le leader d’une nouvelle génération d’écrivains. Les personnages chez Ellis sont souvent jeunes, beaux et riches, des étudiants ou golden boys défoncés et assoiffés de sexe. La plume agressive de Bret Easton Ellis se veut une arme contre la superficialité et l’auto-destruction de la jeunesse dorée occidentale, le tout dans un style très sobre, laconique et dénué de jugements.
 



 
Dans Less than Zero, on suit Clay, un jeune homme de 18 ans qui a tout pour plaire : un beau minois et de l’argent. Il mettra ces caractéristiques à contribution en passant le plus clair de son temps à se droguer et à baiser. Construit comme un enchainement de saynètes voulant rappeler les clips MTV représentant le symbole de cette génération ennuyée et friquée, ce premier roman attire les foudres de certains critiques conservateurs. Mais également l’intérêt de plusieurs éditeurs, dont Simon & Schuster, qui fait signer un contrat de 300 000 USD à Ellis pour son troisième roman (American Psycho)…avant de refuser sa publication en raison de l’insurrection des ligues féministes. C’est alors Vintage qui reprend le flambeau…
 



 
Le deuxième roman de Ellis, The Rules of Attraction (Les Lois de l’Attraction), reprend un thème semblable à Less than Zero dans la mesure où on suit la vie de campus de plusieurs étudiants, leur constante recherche de sensations fortes (drogues et sexe principalement) et la vacuité de leur personnalité. Cette œuvre sortie en 1987 a été adaptée au cinéma par Roger Avary en 2002 (James « Dawson » Van der Beek et Jessica Biel dans le cast…).
 
 
 
En 1991 paraît le roman le plus célèbre et controversé de B.E. Ellis, American Psycho. Il narre les exploits de Patrick Bateman, un yuppie new-yorkais lisse et parfait. Beau gosse, sportif, il a tout pour lui. Et pourtant, son journal intime nous révèle bien des atrocités puisqu’il lui arrive de tuer des clochards, de violer et massacrer de jeunes femmes qu’il a attiré dans sa couche. Ces scènes sanglantes sont décrites avec la froideur du scalpel, avec une précision presque clinique, sans états d’âmes, et même parfois avec un humour cinglant. Bateman est séduisant malgré les crimes qu’il perpétue, et c’est justement cette attirance du lecteur pour cet homme qui montre bien le côté pervers de l’être humain. Perversion qui a valu à Ellis de nombreuses critiques ainsi que des menaces de mort, car Bateman est trop ambigu : à la fois attrayant et monstrueux, golden boy superficiel la journée et assassin sans scrupules la nuit.
 
Cette perle noire de Ellis a également été adaptée sur le grand écran en 2000 : joué par Christian Bale, Willem Dafoe et Reese Witherspoon, ce thriller culte donne une idée assez satisfaisante de la violence du roman.
 



 
Quelques années plus tard, Zombies est publié : il s’agit d’un recueil de nouvelles très violentes et acerbes, toujours implantées dans le milieu favorisé américain.
 
 
 
Enfin, en 1999, c’est au tour de Glamorama, très attendu, de défrayer la chronique. Davantage construit que ces précédents travaux dans le sens où il y a une trame plus franche, il décrit les tribulations de Victor Ward, top model branché, survolté et plein de vide. Une fois n’est pas coutume, Ellis s’attaque à la notion d’image de soi, du paraître et de superficialité. Ainsi, on a droit à des descriptions à n’en plus finir des complets Gucci et du portable dernier cri de Ward.
On notera une extension thématique chez Ellis, mais également une deuxième partie un peu bancale, ce qui donne une impression mitigée de ce Glamorama où l’on retrouve Patrick Bateman, le serial killer de American Psycho toujours en cavale, au détour d’un chapitre. Cette continuité des personnages et les liens que Ellis tisse entre eux (Sean, un des personnages principaux de The Rules of Attraction, est en fait le frère de Patrick) en font un panorama familial dérangeant. Les exploits d’une famille américaine lisse en surface mais dissimulant un mal-être profond.

A noter qu'en tant que grand fan de rock, Ellis parsème ses chapitres de références musicales de l'époque. Ainsi, les jeunes gens décrits dans ses romans écoutent souvent de la musique : Led Zeppelin, Talking Heads, REM...
 



 
Pour conclure, on citera encore le dernier effort de Bret Easton Ellis, Lunar Park, sorti en août 2005 aux Etats-Unis. Mêlant la réalité à la fiction, il retrace la vie d’un auteur qui, à vingt ans à peine, se retrouve propulsé au rang du plus grand écrivain de sa génération. S’ensuit une série de péripéties, de gloires en désillusions…entre meurtres, paranoia et horreur.

La page officielle de LUNAR PARK
 
 

On l'aura compris, Ellis se place comme l'un des écrivains américains les plus intéressants et lus, au même titre que Coupland, Ballard et Palahniuk.
 
 
Donc à suivre.

 

 

Vous retrouverez les romans de Bret Easton Ellis traduits en français aux éditions de poche 10/18

 

A LIRE EGALEMENT...


- un article sur Glamorama (chez Thom)

Publié dans Writers

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C
tiens pour changer, un prix nobel magnifique  à la prose ultra lisible : herman hesse ( il a ecrit entre autre ; siddharta et le jeu des perles de verre ). C'est vrai que les nobles ont qq chose de chiant - parfois - mais la complexité de l'ecriture est aussi un challenge pour le lecteur, je vois cela comme ça... Bon, pour revenir  à BEE, je trouve juste que cet ecrivain est trop " hip" pour aller au fond  des choses, d'ou l'ex de l'avion ( revelateur ) on ne peut pas  à la fois denoncer la societé materialiste et s'y conformer, l'ecriture demande un soupçon de coherence sinon on ecrit en deça de ses possibilités et pour l'avoir entendu en interview chez ardisson, je trouve BEE loin d'etre stupide mais ecrivant en deça de ses capacités d'ecriture. Il se gache lui même en d'autres termes. Je ne critique ni ton article ni tes gouts en disant cela, je suis sincere, parfois la polemique c'est mieux que de dire ' c'est genial ' alors qu'on pense tout le contraire...@+
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S
Ciao Bagheera! Hermann Hesse? Siddartha m'a beaucoup plu également... pour les Nobels, c'est drole, tu as écrit "les nobles ont quelque chose de chiant", lapsus? ;-)Et encore merci pour cet ajout sur BEE, je n'ai pas vu cette interview chez Ardisson... et évidemment je ne prends pas personnellement ta critique, ce serait stupide, je sais bien que tu parles de l'auteur et les sensibilités diverses font qu'il est normal que l'on apprécie pas TOUJOURS les memes choses!A+ bonne fin de semaine
B
Ok mais toute la questionn est là : doit on denoncer la violence par la violence ? vieux debat mais la question reste non resolue...Pour ce qui est de faulkner, excuse moi , je tique un peu : c'est un prix nobel, qu'il soit difficile  à decoder, c'est un fait, mais illisible, tout de mm pas. Disons que son ecriture est codé et c'est precisement ce qu'il y a de passionnant dans celle ci, et ce qui  est rebutant  au 21eme siecle ou finalement, on ne gratte pas toujours assez la surface d'un auteur ( ça fait la part belle  à des marc Levy - sortez les gousses d'ail, pitié ), bref, pour en revenir  à BEE, je le trouve un peu trop "ivy league", politically correct, eet s'ncanaillant  à moindre frais.. Il y a des cineastes comme cela aussi, c'est une ecole californienne typique generation baby boomer. je me souviens d'une interview de lui que j'avais lu dans les inrock il y a une disaine d'année ou il affirmait avoir tres peur de l'avion au point de ne se deplacer qu'en concorde pk c'etait le seul avion   à s'etre jamais vautré, vu la castastrophe impliquant concorde en 2000, suivi de sa mise au rebus, je plains cet ecrivain ultra chic qui doit desormais se taper 11 h de boeing de LA à Paris ou londres, ça doit etre + vaumitif que certaines pages de American psycho... euh, oui, tu sais, quand je casse je fais pas dans la 1/2 mesure, au demeurant, merci de me permettre de parler, grace  à ton article, interessant au demeurant, d'un ecrivain que je n'aime pas. parfois, on ne parle que de ce qu'on aime sur nos blogs respectifs, là au moins ça permet un debat. mais c'est en toute sympathie, rien de mesquain, j'exprime juste ma pensée face  à un conflit litteraire qui est aussi qq peu " inter generationnel, j'ai tendance  à faire confiance aux classiques en matière de litterature + qu'au novateur de tout poil, surtout quand ils ont une certaine veneration pour le dieu dollar tout en s'offrant le luxe de cracher dessus ( anarchisme de luxe ! ) bon ben si y'a encore des lecteurs de Ellis qui ont lu jusqu'au bout cette longue diatribe, je m'excuse auprès d'eux de "calamiter"  ainsi leur auteur chéri..:D...pas gentille la panthere...
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S
Coucou Bagh! Merci beaucoup pour ce nouveau commentaire. J'ignorais cette histoire d'avion de Ellis, c'en est presque drole... d'un coté c'est le genre de trucs qui minent la crédibilité d'un auteur envers son lectorat, d'un autre, c'est une chose à laquelle on s'habitue, car finalement, les écrivains ont tous leurs tares (et leurs torts) et la plupart du temps, sont des individus vils ou mesquins... :-) mais cela permettra à ceux qui le glorifient de réfléchir un peu.Effectivement, je traite exclusivement d'artistes que j'aime sur ce blog, car ce serait une perte de temps pour moi que de casser du sucre sur le dos de musiciens, cinéastes ou écrivains dont je n'ai rien à faire ou qui me débectent... mais évidemment, c'est le point de vue des visiteurs grace à leurs commentaires qui va permettre de nuancer le propos, et de l'enrichir, surtout. La plupart du temps, les "commentateurs" vont dans le sens du poil, sans doute parce que ceux qui ne sont pas d'accord ne daignent pas laisser un mot, soit par dépit, soit pour ne pas créer de polémique. Rarement, il y a des commentaires d'insultes ou encore railleurs... mais dans ton cas, je sais que cela est constructif et je t'en remercie...Pour Faulkner, c'était en partie une boutade, tu sais que j'aime bien te taquiner... maintenant il faut avouer que l'ami William F, prix Nobel ou pas, a une prose qui n'est pas toujours des plus agréables, comme l'autre Joyce, encore pire... et meme pas prix Nobel ;-)
B
bon je vais denoter sans doute mais je n'aime aps du tout bret easton ellis, sauf son dernier Lunar Park, ou il cesse de donner dans le fashionable pour enfin gratter la surface, au bout de près de 20 ans il etait temps !  j'ai lu Less than zero...Bof. Mais j'ai bcp aimé la BOdu film ( autrement dit rien  à voir avec Ellis ) , + grave, A psycho m'est tombé des mains. C'est à mes yeux un livre extraordinairement misogyne et un portrait psychologiquement incrédible de serial killer. A part l'outrance je ne vois pas ce qu'il a voulu prouver, là. Parce que mm le best of  Fucci ( ciné ) est moins violent  à mes yeux que le livre american psy ( je parle pas du film - un navet)...non, voila, desolée je n'aime pas du tout, du tout... Lire un Ellis cela me fait regretter GRAVE un steinbeck ou un  faulkner, qui abordait des themes comme la folie ou l'inceste, le meurtre la prostition etc etc MAIS avec une toute autre profondeur...je suis pas "hyp", ça doit etre cela :D
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S
Hello Bagh! Des avis négatifs sur Ellis sont tout aussi importants que les éloges... sinon on va passer pour des adorateurs ultimes d'auteurs nihilistes et violents ;-)La misogynie et la superficialité des personnages de Ellis, c'est évidemment un symptôme de cette narration à la première personne où les actes du personnage ne sont pas critiqués... Ellis n'a certainement pas pris le point de vue du moralisateur "direct", mais nous laisse tirer les conclusions évidentes : ces individus sont ravagés et stupides, pas de doute.Maintenant, je ne pense pas que l'on puisse comparer Ellis à Steinbeck et Faulkner qui, bien que parfois illisibles (je pense au second) ont cette dimension humaine qui fait défaut dans toute la littérature américaine actuelle, où tout n'est que violence gratuite. Mais c'est ça, l'Amérique aujourd'hui, d'où l'utilité d'un Bret Easton Ellis.
G
De rien !Si "les lois de l'attraction" m'a autant marqué, c'est bien sûr parce que c'est le premier livre d'Ellis que j'ai pu lire. Mais si je l'avais lu après d'autres... peut-être aurais-je été un peu moins frappé par celui-là. Bonne lecture, pour les deux qu'il te reste !
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S
Oui, exactement... et encore merci GT!
G
Salut Sys, Bret Easton Ellis est sans conteste l'écrivain qui m'a le plus marqué. Donc, bien évidemment, mon écrivain favori.  Le premier de ses bouquins que j'ai pu lire est "Les Lois de l'attraction", sans doute mon plus gros "choc littéraire". Même si tous ses romans ont chaque fois été pour moi une "grande claque".Par contre, je n'aime pas les adaptations cinématographiques, qui n'ont rien gardé de "l'essence de ses romans".Le film American Psycho est juste un thriller comme un autre, pas totalement déplaisant, mais loin de l'esprit du livre. Le film est du "spectacle', point barre, mais le livre est vertigineux. L'adaptation des "lois de l'attraction", j'ai vraiment détesté (alors que j'avais beaucoup aimé Killing Zoe du même Roger Avery). Les personnages, dans le livre, étaient peut être désoeuvrés et superficiels... ils n'étaient pas aussi caricaturaux.Le problème, c'est que le sujet du livre, s'il était provoquant pour l'époque, ne l'est plus du tout en 2002 quand a été fait le film. On avait déjà vu dans des tas de films des jeunes désoeuvrés et défoncés. Mais la  différence, c'est surtout le style. Ellis arrive merveilleusement bien à faire passer dans son écriture le malaise de cette jeunesse paumée, la mélancolie, le manque de confiance, de but et de repères, qu'ils essayent de cacher sous les apparences et d'oublier dans l'abus de sexe et d'alcool. La grande réussite du livre, c'est d'arriver, subtilement et sans pathos, à nous plonger dans leurs fêlures.... le film, c'est l'inverse... tout est soit trop "creux", soit trop "spectaculaire" ou forcé.Pour ce qui est des "interminables descriptions" dans American Psycho, non seulement ça ne m'a pas ennuyé, contrairement à ce qu'a ressenti lady Domi, mais, j'ai trouvé ça formidable. Alors que je suis tout sauf une fashion-victim (je ne connais même pas les marques de mes propres fringues... au grand désespoir de ma chère et tendre... qui aimerait que, lorsque j'achète un vêtement, je ne me limite pas à mes seuls 2 critères : 1. Uni, pas de motifs voyants, fun ou tendance 2. Pas trop cher) Bon, déjà que je fait long, si je commence à raconter ma vie, on va pas s'en sortir....Donc, cette obsession des marques, des objets se traduit par des listes hypnotiques, qui sont finalement les pensées les plus intimes du personnage, puisqu'il est incapable de se connecter à ses émotions... elles traduisent aussi son obsession du paraître, lui qui est dans un monde où les seuls crimes sont de ne pas avoir les chaînes hi-fi et matériel technologique du dernier cri, ou la veste Armani la plus classe. Et, surtout, elles révèlent parfaitement l'absurdité matérialiste et consumériste des années 80...Je parle surtout d'American Psycho et des Lois de l'attraction... pourtant, ceux que je préfère - même su je les adore tous - ses deux romans qui me semblent les plus réussis et aboutis sont les deux derniers, Glamorama et Lunar Park... mais bon, je vais m'arrêter là, sinon je vais y passer la nuit !A plus !       
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S
Re-ciao GT! Je regrette un peu la teneur de ces anciens articles qui sont assez brefs et peu développés... mais il m'est un peu difficile de m'y replonger pour les améliorer... heureusement les commentaires comme le tien (ou ceux d'Arkham par exemple pour le cinéma) permettent de pallier à ces manques... :-)Je dois dire que "Les Lois de l'Attraction" ne m'a pas laissé une impression aussi forte que toi, pour commencer... peut-etre parce que j'ai lu "American Psycho" avant, peut-etre parce que Ellroy ou Palahniuk avaient pavé cette voie auparavant... mais sinon, je suis assez d'accord avec toi pour ce qui est des adaptations, qui sans forcément etre mauvaises, ne possèdent pas la dimension des romans, donnant l'impression à ceux qui ne connaissent pas l'oeuvre de Ellis qu'elle serait assez caricaturale...Tout à fait d'accord pour les desciptions incessantes sur les marques, c'est évidemment symptomatique de cette jeunesse superficielle qui ne trouve d'autres repères que dans le fait d'etre fashion... ou défoncé.Je conserve également tes conseils concernant les deux derniers romans de Ellis... car ce sont ceux que je n'ai pas encore lus... Glamorama traine lamentablement sur ma bibliothèque, à Genève... et j'attendrai la sortie de Lunar Park en poche, j'imagine...Merci GT!!!!!