Lester Bangs : Psychotic Reactions et autres Carburateurs flingués

Publié le par Systool

Youpi tralala! Quelle a été ma joie lorsque j'ai vu Psychotic Reactions et autres Carburateurs Flingués, premier recueil des articles de Lester Bangs, trôner dans les étagères de mon libraire favori! Ce journaliste rock, passé maître dans l'illustration des plus grandes perversions de ce courant musical, avait la plume venimeuse, le verbe acerbe et le cortex sous pression. N'a-t-il pas dit lui-même :


J'étais peut-être candidat au titre du meilleur écrivain d'Amérique. Qui était meilleur? Bukowski? Burroughs? Hunter Thompson? Laissez tomber. J'étais le meilleur. Je n'écrivais pratiquement que des critiques de rock, et encore, pas tant que ça.


Voici une tirade qui résume, outre les influences littéraires majeures de Bangs, son humour décalé et son style inimitable. Bangs métabolisait une quantité phénoménale de disques (et de barbituriques) et en extrayait la substance brute dans ses chroniques sans queue ni tête, parues dans des magazines tels que Creem, Rolling Stone ou Village Voice jusqu'en 1982, année de son décès. Psychotic Reactions, reparu en septembre 2006 dans sa deuxième édition française, nous permet de marcher sur les pas de cet auteur fascinant, drolissime et déjanté.



Nous y trouvons, passée l'introduction de son ami Greil Marcus, l'origine du titre du livre (le nom de deux albums des obscurs et passables COUNT FIVE) et une critique du poignant Astral Weeks de Van Morrison, l'un des musiciens que Bangs vénère, au même titre que les Stooges ou Charles Mingus. L'occasion pour le journaliste de nous balancer nos quatre vérités :

Le monde musical est plein de crétins et de charlatans, avec au milieu un génie ou un cinglé

ou encore :

Ce dont nous avons besoin, c'est de «stars» rock prêtes à passer pour des imbéciles, à faire le grand plongeon et si nécessaire à se comporter de telle sorte que leur public ait honte pour elles, aussi longtemps qu'il leur reste le moindre lambeau de dignité ou d'auréole mythique. Parce qu'alors tout le foutu édifice prétentieux de l'industrie rock (...) s'effondrerait, et avec lui les carrières de non-entités sans talent qui s'en nourrissent.


Avouons que c'est à mille lieues des platitudes convenues que l'on peut lire dans les magazines actuels. Bangs poursuit avec des digressions sur les influences cachées de JETHRO TULL, un film de troisième zone, les glaciaux KRAFTWERK et une chronique de Station to Station qu'il apprécie à la différence de son compositeur, David Bowie. S'ensuit une partie consacrée à Lou Reed avec, à la clé, une joute verbale désopilante et des critiques de Metal Machine Music et Coney Island Baby, deux albums de l'ancien Velvet en plein trip métaphysique. C'est là que réside la force de Lester Bangs : dresser des portraits javelisés de ces personnages monstrueux du rock, en analyser les failles et les aspérités avec son style décousu. Car malgré ses excès, Bangs faisait preuve d'une lucidité confondante, ce qui lui a valu l'admiration de nombreux musiciens tels que le CLASH, avec qui il part en tournée en 1977. Ainsi sa pseudo-rubrique nécrologique nous permet de déterrer quelques secrets sur le King Elvis ou encore John Lennon, mais aussi d'aborder des sujets tels que la célébrité, le racisme et la relation des musiciens avec le public.


Au même titre que Fêtes sanglantes et mauvais goût - le deuxième tome des aventures de Lester déjà chroniqué ici - ce pavé fourre-tout ravira les amateurs de rock friands de la diarrhée verbale du scribouillard américain, mais nous fera tout de même ressentir une pointe de déception face au décès prématuré de Bangs qui avait, comme il est dit dans l'article introductif, de nombreux projets sur le feu. L'évocation de quelques titres suffirait à récolter l'hilarité générale : Tout ce que vous pourriez faire aujourd'hui si votre mère était la femme d'Iggy Pop, Vivez comme un milliardaire sans aucun revenu – je le fais tout le temps et ce livre vous explique comment et j'en passe... Vous pouvez d'ailleurs vous jeter sur la biographie de Lester Bangs rédigée par Jim De Rogatis (aux éditions Tristram également) si vous souhaitez en découvrir davantage... Bonne lecture!


Lester Bangs – Psychotic Reactions & autres carburateurs flingués (Editions Tristram, 2006, 532 pages)

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Publié dans Music Books

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J
Salut à toi!! Arrivée ici par hasard, c'est avec intérêt que je vais  lire ce que tu as écrit sur la musique et la littérature. Moi Meme fan de rock des années 70 et de littérature, cest toujours marrant de voir ce quil ce passe dans les autres monde!!<br />  <br /> a plus!!<br />  <br /> jasmine
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S
Hello Jasmine!Je t'en prie... visite un peu ça à ton aise... j'espère que tu y trouveras des choses intéressantes ;-)A+
A
salut Syst... et merci pr la réponse ;-)!
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S
Je t'en prie, Alf... merci à toi de t'y intéresser :-)
A
moi aussi il est ds ma pile des "prioritaires", avec entr autres "please kill me". Ceci dit, j'avais lu le "lou reed" de Bangs publié par R& F  il y a un an ou deux. J'avais été frappé par le côté outrancier et provocateur, assez sympa car peu conventionnel ds la critique rock actuelle. Genre le gars prêt à provoquer une baston sans s'inquiéter des conséquences. Maintenant est-ce que cela en fait le 'meilleur critique rock américain' pour autant? Sais pas... Sans doute l'un des plus représentatifs du 'nouveau journalisme' de l'époque, revendiquant la subjectivité sans complexe et totale. Mais est-ce que LB était aussi musicien? Est-ce qu'il avait un groupe, etc.? Because la frustration parfois pousse à vitrioler facile... (je n'émet spas de jugement, ni ne pose d'hypothèse: je ne connais pas son parcours perso; je pose juste la question peut-être pourras-tu en dire plus?<br /> salut
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S
Hello Alf! Pour ce qui est du côté provocateur, en effet, Bangs n'a pas son pareil... je ne pense pas que c'est cela qui en fait le meilleur critique rock, si meilleur critique rock il doit être... c'est plutôt sa façon d'écrire et les "concepts" qu'il a pu aborder...Tu as raison pour le côté "journaliste rock frustré", mais je ne sais pas si cela s'applique à Bangs... il avait certes un groupe de musique, dans lequel il jouait un peu (harmonica, guitare) et chantait... il composait également les paroles, je crois... dans tous les cas, je ne connais pas la qualité de ses compos... je ne sais même pas si des bandes ont été enregistrées, mais Bangs et ses potes étaient souvent dans des états pas possibles lorsqu'ils répétaient :-)A+ Alf et merci pour les questions!
M
happy birthday to you happy birthday to you happy birthday to you Syst - chou happy birthday to youuuuuuuuu !!! biz et plein de bonnes choses une nouvelle foisparce que tu le vaux bienMélie
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S
:-D
L
Ah ok lol, j'ai cru que tu te moquais de moi.... Paranoia galopante petite lélé...
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S
Pas grave... faut dire que j'ai été peu explicite...