REQUIEM FOR A DREAM (Darren Aronofsky, 2000)
On retrouve dans tout bon manuel de psychiatrie la définition du syndrome de dépendance, avéré en la présence d’au moins trois des six critères suivants :
Ce syndrome de dépendance, communément attribué à des drogues, pourrait tout à fait être étendu à d’autres produits tels que la télévision ou le sexe, et cela, Darren Aronofsky ne l’a que trop bien compris. Ce jeune réalisateur, a qui l’on doit déjà le torturé Pi, nous livre en 2000 un film sur la drogue, Requiem for a Dream, sujet déjà abordé par de nombreux cinéastes avec une réussite somme toute relative. Certains ont traité la drogue sous un aspect ludique et destructeur (Danny Boyle avec Trainspotting), d’autres comme un des symptômes de la guerre et du mal-être américain (Las Vegas Parano de Gilliam, d’après Hunter S. Thompson) tandis que Schatzberg a donné une vision sociale plus réaliste avec Panic in Needle Park (interprété par un Al Pacino encore jeunot). Sans oublier les piètres réalisations moralisatrices et simplistes qu’on passera sous silence…
Aronofsky prend le pari d’aborder la situation de front en nous dépeignant la descente aux enfers de Harry (Jared Leto), son pote Tyrone (Marlon Wayans), sa petite amie Marion (Jennifer Connelly) et sa mère Sara (Ellen Burstyn). Adapté du roman de Hubert Selby Jr., l’un des grands écrivains new-yorkais de la deuxième moitié du XXème siècle, par ailleurs décédé en 2004, Requiem for a Dream bénéficie de ce cast aussi surprenant que judicieux : on se souvient de Leto, gueule d’ange de Fight Club et plus tard malfrat dans Panic Room, deux films de David Fincher, quant à Marlon Wayans, il se révèle un acteur tout à fait doué, malgré le fait qu’il tourne dans les productions de ses frères (Scary Movie…). Concernant Jennifer Connelly, on l’a vu dans A beautiful Mind et les férus de cinéma se souviendront qu’elle jouait déjà enfant dans l’un des grands classiques de Leone, Il était une fois en Amérique. Enfin, rappelons-nous du rôle d’Ellen Burstyn dans l’Exorciste, à savoir la mère de Regan la possédée…
Maintenant que les présentations sont faites, lançons-nous sans plus tarder dans le synopsis de Requiem for a Dream… Les trois teenagers goûtent aux joies démoniaques de l’héroïne et vont rapidement découvrir les affres de cette substance illicite, tandis que Sara, la maman d’Harry, est confortablement installée devant son poste de télévision. Elle reçoit un jour un appel téléphonique et apprend qu’elle est conviée à participer à son émission TV favorite et, toute pimpante mais présentant malheureusement un certain embonpoint, remarque à son grand déplaisir qu’elle ne rentre plus dans sa belle robe rouge. Pas de panique, la solution est toute trouvée : un médecin (on va l’appeler ainsi) lui prescrit des amphétamines afin qu’elle perde ces satanés kilogrammes superflus…
Le décor est posé et Aronofsky va nous conter la chute inexorable de ces quatre individus au moyen de sa caméra virevoltante et inspirée… les effets de « plan-séquences » lors de la prise compulsive de certaines substances (héro, TV, petit-déj, joint, tout y passe…) sont particulièrement marquants, au même titre que les écrans splittés qui nous montrent Harry et Marion, amoureux mais vite dépassés par les événements. Pour couronner le tout, on notera l’excellente bande-son de Kronos Quartet, un mélange entêtant et solennel de classique et de sons électroniques.
Aronofsky nous dresse un portrait stylisé et sans complaisance de ces individus et des méfaits de la drogue, sans prendre un ton paternaliste ou comique. Juste une réalité de l’addiction. Sa réalité et celle de Selby Jr.

REQUIEM FOR A DREAM – USA – 2000
Réalisé par Darren Aronofsky
Tiré du roman de Hubert Selby Jr.
Avec Ellen Burstyn, Jared Leto, Jennifer Connelly
Regardez une bande-annonce de REQUIEM FOR A DREAM