ROBERT ALTMAN : Le vieil Homme et l'Amer (bio)
Lorsqu’on jette un œil à la filmographie de Robert Altman, on ne peut qu’être ébahi par la qualité et la variété de ses réalisations : on lui doit, depuis 1970, des œuvres aussi fascinantes et iconoclastes que M.A.S.H., Nashville, Short Cuts et plus récemment Gosford Park.
Né à Kansas City en 1925, le jeune Robert rejoint l’Armée américaine durant la deuxième guerre mondiale et participe à des missions à Bornéo. Après ce conflit sanglant, il intègre une école d’ingénieur puis se rend à New York pour tenter sa chance comme écrivain, mais ce sera finalement sa collaboration chez les Productions Calvin qui lui ouvrira la voie vers le cinéma. Altman économise ses dollars pour réaliser, en 1957, son premier long-métrage, Les Délinquants. La même année, il dirige l’Histoire de James Dean et le buzz médiatique autour du récent décès de la star permet à Altman de se faire remarquer par Alfred Hitchcock qui lui donnera une chance pour réaliser une série télévisée. Le jeune Robert a les dents longues et il poursuivra sa carrière dans la petite lucarne pendant quelques années.
Son caractère anti-conformiste et sa propension à injecter des thématiques politiques « anti-guerre » causeront maintes fois son éviction des plateaux, mais le boulot ne manquait jamais et Altman a pu se forger une expérience notable en travaillant à la télévision. Il réalise un nouveau film en 1969, That cold Day in the Park, qui bénéficie d’un insuccès massif, tant au niveau critique que commercial. Il décide de se lancer, l’année suivante, dans l’adaptation d’un roman satirique, M.A.S.H., dont Donald Sutherland et Elliott Gould (le père de Ross et Monica dans Friends, hum) sont les acteurs principaux. Plusieurs réalisateurs se sont cassés les dents sur ce script et les deux comédiens n’apprécient que peu les méthodes bizarres d’Altman. Mais M.A.S.H. est un triomphe retentissant : Palme d’Or au Festival de Cannes, de nombreuses nominations aux Academy Awards et la possibilité pour le cinéaste américain de prendre part à des projets plus ambitieux… Il faut dire que ce conte irrévérencieux narrant les exploits de deux chirurgiens durant la guerre de Corée est un véritable bijou : un film à la fois engagé et drôle qui comprend également la prestation de Robert Duvall dans le rôle du Major Burns.
Après l’expérimental et oublié Brewster Mc Cloud, Altman remet les pendules à l’heure avec Mc Cabe et Mrs. Miller, The Long Goodbye et Thieves like us, des réalisations qui comptent parmi les meilleures de cette première moitié des années 70. En 1975, un autre grand classique voit le jour : il s’agit de Nashville. Ce film retrace cinq journées dans la vie de 24 personnages vivant dans la capitale de la country et faisant tout pour obtenir la gloire et la puissance. Cette critique acerbe de l’Amérique via un mosaïque de portraits sera repris près de vingt ans plus tard dans Short Cuts, une autre gemme dans la filmographie d’Altman. Sa réalisation suivante, Buffalo Bill et les Indiens, sera boudée par le public et Altman refusera même le grand prix du Festival de Berlin, sous prétexte que la version montrée à l’assistance était amputée de nombreuses scènes que le producteur Dino de Laurentiis avait soigneusement mises de côté.
Ce désaccord laissera un moment Altman sur la touche et contraint de trouver seul les fonds pour réaliser ses projets ambitieux, ce qu’il faisait par ailleurs depuis 1964 grâce à sa maison de production Lion’s Gate Films. Après le drame 3 Femmes et la comédie Un Mariage, Bob Altman s’attaque à l’adaptation de Popeye (!!!) avec le jeune Robin Williams dans le rôle-titre. Le réalisateur se heurte cependant à l’indifférence des critiques et du public et décide de vendre son entreprise de production. Les années 70 se terminent d’une bien sombre manière pour le talentueux cinéaste.
Altman rebondira au théâtre et surtout à la télévision grâce au documentaire Secret Honor sur le Président Nixon ainsi qu’à ses collaborations avec HBO et ABC. Durant les années 90, on retrouve enfin l’ami Bob au ciné. Après la série TV Vincent et Théo, portrait de Van Gogh, il met en scène The Player, cueillant l’occasion de régler ses comptes avec Hollywood grâce à cette critique musclée des sirènes du showbiz. L’année suivante, c’est Short Cuts, un chef d’œuvre qui montre, si besoin était, l’abilité d’Altman à jouer avec plusieurs histoires, ce qu’il avait déjà fait avec Nashville et que Paul Thomas Anderson, en disciple studieux, reprendra dans Magnolia.
Après les médiocres Prêt-à-porter et Gingerbread Man, Altman nous a livré ces dernières années de jolies pépites telles que Cookie’s Fortune (les tribulations d’une famille dans le Sud des Etats-Unis) et surtout Gosford Park, histoire de meurtre se déroulant dans la haute société britannique et dotée d’un cast éblouissant : Maggie Smith, Michael Gambon, Kristin Scott Thomas, Emily Watson et Clive Owen. Parmi les projets futurs de Robert Altman, on citera Paint (avec Salma Hayek) et Prairie Home Companion.
EDIT DU 20 NOVEMBRE 2006 : R. Altman est décédé... snif