DILLINGER ESCAPE PLAN : Ire Works (chronique, 2007)

Publié le par Systool

"Mais qu'est-ce qu'il a, Systool, avec THE DILLINGER ESCAPE PLAN? Ca doit bien être la deuxième ou troisième fois qu'on a droit à ces tarés!" En fait, c'est la quatrième. J'ai une affection particulière pour ce groupe tout simplement parce qu'il parvient immanquablement à repousser les limites du genre (which one?) à chaque reprise. Mais aussi parce qu'en tant que modeste musicien, DEP représente un peu ce que j'ai toujours voulu jouer : une musique résolument agressive, bruyante mais possédant cette touche d'impertinence qu'on retrouve dans ces intermèdes jazzy venus apaiser quelque peu nos oreilles après une minute de furie. Y a pas à tortiller du cul, le quintette est diablement technique mais sans jamais nous les gonfler avec un solo de trois minutes. C'est plutôt un break de six secondes top chrono et on a à peine le temps de s'y acclimater qu'ils sont déjà passés à autre chose. Depuis l'arrivée du chanteur Greg Puciato à l'occasion de l'énorme Miss Machine (2004), la formation du New Jersey a perdu quelques fans obtus qui en étaient restés aux électrochocs furieux de Calculating Infinity (1999) et voyaient d'un mauvais oeil les percées plus mélodieuses. Alors qu'en est-il de Ire Works, nouvelle galette du combo? Il faut préciser d'emblée que Chris Pennie et Brian Benoit, respectivement batteur et guitariste, ont pris leurs cliques et leurs claques et ont été remplacés par Gil Sharone (STOLEN BABIES) et Jeff Tuttle, Ben Weinman demeurant en fin de compte le seul membre de la formation originelle. 

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L'heure n'est pas aux hésitations et DILLINGER nous bottent le cul dès l'ouverture, la sanglante Fix your Face qui, fait intéressant, voit la présence de Dimitri Minakakis (ancien gueulard de DEP) aux backing. Pour le coup, ils nous font une tête au carré en nous livrant un des arguments les plus valides de leur répertoire habituel : un brûlot de 2:30 laissant à peine le temps de souffler durant un pont central destructuré. On appréciera le soin particulier que prend le groupe à rechercher des titres comiques truffés de références assez disparates : Lurch nous rend aussi livide que l'échalat de la Famille Addams, tandis que 82588 serait un clin d'oeil à la date de sortie (25 août 88) de ...And Justice for all des Four Horsemen, que Puciato a avoué considérer comme l'un de ses albums favoris (y a pas de mal). Première surprise avec la troisième piste, Black Bubblegum. Le couplet n'est pas sans rappeler NINE INCH NAILS mêlé à MUSE, tandis que la première partie du refrain présente une ligne de chant assez féminine (soyons fous), un substantif a priori banni chez les fidèles de DEP. On remarquera que la moitié des titres dure deux minutes ou moins, une caractéristique plus proche du DILLINGER des débuts : bref et efficace, mais sans être forcément inoubliable (Nong Eye Gong). Parallèlement à cela, la bande de Weinman reprend les choses là où elle les avait laissées avec Miss Machine : davantage de place à la mélodie et à un chant au vrai sens du terme. La nouveauté avec Ire Works consiste en l'adjonction nettement plus marquée d'éléments électroniques, comme sur l'étonnante Sick on Sunday qui mêle hardcore épileptique, bizarreries sonores et le chant suave de Greg Puciato. L'instrumentation s'étoffe encore puisque l'on a même droit à des percussions orientales et des violons sinistres sur When acting as a Particle et un traitement rythmique hallucinant sur son pendant When acting as a Wave.


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Liam Wilson, Greg Puciato, Jeff Tuttle, Ben Weinman et Gil Sharone


La deuxième partie de ce concentré d'ultraviolence avec 0% de matières grasses contient d'autres réjouissances telles que
Milk Lizard, qui démarre sur les chapeaux de roue avec son riff tonitruant avant que des cuivres et un piano free jazz ne viennent titiller nos oreilles. Passé le deuxième refrain, qui nous permet d'apprécier la tessiture vocale de Puciato (et ses cris de grand-mère hystérique), on assiste à une conclusion apocalyptique - je pèse mes mots - avec une ligne de piano toute tranquille, double-pédale à fond les ballons et wah-wah cyclonique. Le rush final est amorcé par Dead as History, se distinguant par sa longue introduction atmosphérique et sa guitare acoustique presque zappaïenne, avant l'entrée en jeu d'un riff mastodontique. Puciato opte une fois encore pour un refrain chanté qui n'aurait pas dépareillé dans le catalogue d'INCUBUS. Horse Hunter redéfinit le funk-hardcore-metal (Brent Hinds de MASTODON fait une apparition) et Mouth of Ghosts, après une intro apaisée, nous offre une chevauchée piano-batterie (ont-ils engagé Keith Jarrett?) et un dernier feu d'artifices de guitares stéroïdées...


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L'enjeu était de taille car après un Miss Machine unanimement salué par la critique, DILLINGER ESCAPE PLAN se devait de convaincre et si possible, surprendre. Pour la moitié des titres, la formation se « contente » d'assurer l'efficacité (Fix your Face, 82588, Party Smasher), mais parvient sur le restant des chansons à se réinventer en élargissant son rayon d'action de manière appréciable (le piano de Milk Lizard et les ambiances de Mouth of Ghosts, les instrus When Acting as a...). Greg Puciato, dont on pouvait critiquer la ressemblance vocale avec Mike Patton sur certains anciens titres, s'impose avec davantage de personnalité et n'hésite pas à moduler son timbre de voix, Black Bubblegum et Dead as History en tête. Concernant les musiciens, et notamment la nouvelle recrue derrière les fûts (Tuttle n'ayant pas participé à l'élaboration de l'album), on peut aisément conclure qu'ils sont impériaux de bout en bout, de véritables machines jamais prises en défaut. Ces musiciens connus pour être des bêtes de scène réalisent ici un nouveau pas en avant et malgré le triangle floydien de la couverture, sont en passe de découvrir la quadrature du cercle...

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THE DILLINGER ESCAPE PLAN – Ire Works (2007, Relapse Records)
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Le Myspace de DEP (des titres en écoute)

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Répétition de "Nong Eye Gong"

Publié dans Metal - Hardcore

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J
Je pense que  c'est un album qui va me suivre en 2008 ;-)
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S
Je crois aussi :-)
J
Bon, je suis en train de l'écouter (fort) et il apparait que cet album est ... une tuerie. Un grand groupe qui a très bien évolué : j'ai souvent été déçu par des groupes qui -au fur et à mesure qu'ils sortaient leurs albums - ne répondaient plus à mes attentes. Avec TDEP c'est le contraire : "Calculating Infinity" a été une révélation éclipsée -en terme de brutalité - par un "City"de Strapping Young Lad indétronable (sorti deux ans avant, je crois)"Irony is a dead scene" est excellent, mais Patton -telle une mante religieuse - a pompé tout le mojo du groupe, malgré des passages musicaux de très bonne facture (et une bonne reprise d'APhex Twin)"Miss Machine" est l'album le plus mûr du groupe, mais - sans te citer - beaucoup trop emprunt de références pattoniennes ... ce qui n'est pas non plus bloquant :-)"Ire Works" : la première écoute est très convaincante, "Black Bubblegum" est exemplaire de musicalité (quant à la référence à NIN, je m'abstiens), les cuivres de Milk Lizard m'ont fait penser à Bad Devil de Devin Townsend (très second degré) et le Mouth of Ghosts final est à écouter avec attention, je pense. Bon, ce n'est qu'une première écoute ;-)P.S : Comme tu me l'avais indiqué, le remplaçant de Pennie est très bon !
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S
Salut John! J'attendais non sans impatience ton commentaire sur ce dernier DEP... et il arrive à point!Que dire? Avec un peu de recul, je dois dire que je considère toujours cet album comme le meilleur de l'année 2007, tout simplement, et une nouvelle démonstration de la part de la formation du New Jersey! Entre les bombes hertziennes que sont "Fix your face", "82588" ou encore "Horse Hunter", ou des titres moins évidents comme "Dead as History" ou "Mouth of Ghosts", il y a vraiment de quoi faire... sans compter sur des OVNIs comme "Milk Lizard" ou "Sick on Sunday" : du grand Art!  Merci pour la rétrospective sur DEP! :-)
N
comme pour le Radiohead, j'ai préféré prendre mon temps pour te de donner mon avis. J'aime beaucoup ce disque mais j'y vois quand même quelques défauts :Pour moi l'album commence réellement à partir du 4e morceau "sick on sunday". En effet, quoique très bon, les 2  morceaux d'ouverture sont trop proche de "miss machine" (même si plus "rock n roll") et ne sont pas assez cohérents avec ce qui suit. Le 3e morceau n'a je trouve, rien à faire ici et m'est insuportable à cause d'un refrain et d'un pré refrain qui me sort par les trous de nez et me rappelle le pire du métal fusion typée 90's. J'exagère peut être un peu mais je trouve ca de très mauvais gout.Pour le reste, je trouve ça vraiment excellent mais j'ai quand même un arrière gout de frustration car il aurait pu être encore meilleur. Mais bon, malgré mes reproches, ce "ire works" est mon disque metal de l'année avec le Neurosis.
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S
Hello Nyko! Content de lire ton avis et je comprends que tu prennes le temps d'écouter un album (ce genre, du moins) de façon répétée avant d'émettre un jugement! Je comprends quand tu dis que pour toi, l'album débute avec "Sick on Sunday", même si je ne suis pas d'accord concernant les trois premiers titres. Sans trop révolutionner leur propos, "Fix your Face" et "Lurch" sont une excellente entrée en matière, je trouve, tandis que j'aime bien "Black Bubblegum" malgré les parties dont tu parles, qui ne me dérangent pas, en fait, au contraire... Je préfère nettement ce titre à "Unretrofied" sur MISS MACHINE, par exemple!La structure de l'album - une alternance quasi-systématique de titres agressifs (les # pairs) et plus calmes ou expérimentaux m'a beaucoup plu et certaines chansons comme "82588", "Milk Lizard" ou "Horse Hunter" sont d'ores et déjà dans mes DEP Favorites, sans parler de l'excellent travail sur "Mouth of Ghosts" ou "Dead as History". Par rapport à MISS MACHINE, que j'adore aussi, je trouve que l'influence pattonienne a été mieux... digérée. Elle est toujours apparente mais bien mieux intégrée que sur l'album précédent! Bref, pour moi aussi, IRE WORKS est le meilleur album de metal de l'année, l'un des tout meilleurs en absolu de 2007...
D
Je reviens un peu en arrière parce que je n'avais pas eu le temps de le lire celui-là... Et ç'aurait été dommage ! Même si je pressens que ce n'est pas ce qui sera de plus simple pour moi à découvrir. Bon, je ne peux pas profiter encore de tes nouvelles merveilles (étant encore en déplacement avec une connexion de m...) mais ça ne va plus tarder. Bon week-end à toi, doc !
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S
Hello D! Ta soif de nouveautés m'épatera toujours! DILLINGER n'est sans doute le groupe le plus accessible, but why not?Vivement que tu aies une bonne connexion pour nous faire voyager dans le cinéma! Bon week-end
T
Salut SysT, je n'ai pas tenu un morceau ... Trop sauvage pour moi !@++
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S
Merci d'avoir essayé, Thierry ;-)