Zodiac : Le chauve allié du zoo d'yaks (David Fincher, 2007)

Publié le par Systool

San Francisco, 1968. Le rock psychédélique bat son plein dans la capitale du Flower Power. On assiste, sur fond de claviers débridés et de percussions tribales (merci Donovan!), au meurtre de deux adolescents recherchant un coin tranquille. Ils trouveront celui qui se fera appeler Le Zodiaque. Voici comment débute le nouveau méfait de David Fincher, qu'on ne présente plus (Se7en, Fight Club, Panic Room...), natif de la Bay Area et qui a vécu, enfant, les couvre-feu et les flashes télévisés sur ce tueur en série revendiquant l'assassinat de 37 victimes. A la différence de ses précédentes réalisations, Fincher s'inspire de faits réels compilés dans le récit de Robert Graysmith, sans nous effrayer vainement avec des effets scénaristiques et des scènes où l'hémoglobine coule à flots. Cette sobriété n'empêche pas le spectateur d'être littéralement subjugué pendant plus de 2h30, tant la dynamique s'avère efficace et nerveuse, du moins durant la première partie de Zodiac, où l'on suit l'enquête menée par Dave Toschi (Mark Ruffalo), de la brigade criminelle du San Francisco Police Department et rapportée par la presse, élément omniprésent de l'histoire. En effet, le Zodiac s'amusera avec elle, et notamment le San Francisco Chronicle, lui envoyant des lettres bourrées de cryptogrammes et menaçant de perpétrer de nouveaux crimes s'ils ne publient pas ses gribouillis. Une façon de terroriser davantage la population en la maintenant constamment informée de ses moindres gestes, et de dénigrer la police qui fait sans cesse fausse route. Parmi les employés du canard de Frisco, on retrouve le journaliste Paul Avery (l'inénarrable Robert Downey Jr) et le dessinateur novice, Robert Graysmith (Jake Gyllenhall) qui tous deux chercheront à démêler cet écheveau.

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On dit que Fincher a demandé à son cast de (re)voir Les Hommes du Président, film de Alan J. Pakula qui relatait l'enquête de deux journalistes à l'époque du scandale du Watergate ayant valu la démission de Richard Nixon. Effectivement, Zodiac se situe davantage dans cette optique que dans celle d'un thriller classique avec poursuites et pan-pan, l'intrigue se déroulant principalement dans les bureaux de la police et du journal. Tout se passe dans les coups de fil incessants, la recherche compulsive dans des dossiers où l'on parcourt inlassablement les mêmes informations, les séances où l'on interroge les coupables présumés, le plus souvent des fêlés qui souhaitent s'attribuer la paternité de ces meurtres. Un élément particulièrement digne d'intérêt représente le rôle de la presse qui, par souci de conserver l'exclusivité, va parfois jusqu'à cacher des informations à la police. Une chose est sûre : que ce soit le jeune Columbo à la voix cassée et aux rouflaquettes (Ruffalo) ou son collègue Armstrong (Anthony Edwards, le Dr Green d'Urgences), le journaliste imbibé aux allures d'Edgar Poe (Downey Jr) ou Robert Graysmith lui-même, chacun y perdra des plumes, souhaitant retrouver l'identité de ce psychopathe qui leur file entre les doigts, au prix de perdre la raison ou sa famille. Dans la deuxième partie du film, alors que la hype s'est décantée et que l'on entend plus beaucoup parler du Zodiac, Graysmith poursuit sa traque avec l'aide des différents protagonistes, ce qui conduira à la parution de son roman en 1991.

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- Mais dis-moi, Seiya, il est plus fort que Shiryu, non?
- Bah, tu sais, moi je préfère Ikki...

 

C'est dans la retranscription fidèle des faits et de l'époque que Fincher parvient véritablement à nous convaincre : cette atmosphère seventies, ces personnages qui mangent, dorment et bossent, sans jouer les héros, simplement guidés par cette volonté opiniâtre de faire concorder les événements avec les maigres preuves qu'ils ont sous la main. Le jeu au poil des acteurs contribue également à faire de Zodiac une réussite, dans la mesure où la frustration des protagonistes s'empare en même temps de nous. Inutile d'en dire davantage, il s'agit sans conteste de l'un des films à voir cette année.

NB : vous m'excuserez pour le calembour navrant du titre de l'article... ceux qui ont vu le film remarqueront néanmoins qu'il recèle un "indice" par rapport au Zodiac ;-)

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ZODIAC
USA – 2007
réalisé par David Fincher
avec Jake Gyllenhall, Mark Ruffalo, Robert Downey Jr


Publié dans Movies

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S
<br /> <br /> En un sens, c'est un peu l'antithèse de SEVEN. ZODIAC est plus réaliste et plus sobre.<br /> <br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Excellente reconstitution, casting brillant, enquête passionnante et une fin frustrante ! On est loin de Seven, mais dans un autre style c'est une réussite.<br /> <br /> <br /> <br />
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S
Zodiac est un film vraiment passionnant d'un cinéaste doué qui prend à contre-pied tout ceux qui en attendait un bête Se7en-like !Et quel plaisir de retrouver Robert Donwey Jr a un tel niveau d'excellence !Chapeau l'artiste !
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S
Superbe film, c'est clair. Fincher est là où on ne l'attend pas! :-)
T
J'ai lu le livre qui est pas mal, mais j'ai pas vu le film.
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S
Merci de donner un avis sur le bouquin!! :-)
D
Merci pour cet article, un des trop rares à rendre justice à ce film. Et à mon avis aussi, comme tu sais, un des plus beaux de cette année.
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S
Hello!Je pense que les critiques pour ZODIAC n'ont pas été si mauvaises, que ce soit de la part des journaux américains, de la presse européenne ou encore de la blogosphère (dont tu peux avoir un aperçu sur critico-blog.viabloga.com). Mais c'est vrai que certains spectateurs l'ont un peu boudé, disant qu'il était trop long ou qu'il ne s'y passait pas grand chose... s'ils pensaient tomber sur un Die Hard, c'était raté, c'est sûr...