DALEK : Absence (chronique, 2004)

Encore un peu de hip hop aujourd'hui... vous savez, les jolies filles en string, le regard aguicheur, les belles piscines et les grosses bagnoles étincelantes sur lesquelles trône fièrement un rappeur musclé, tatoué, avec de rutilantes chaînes en or... DALEK n'aime pas vraiment ça... ou peut-être n'ont-ils tout simplement pas les moyens. Quoi qu'il en soit, on les imagine plutôt au fond d'un studio sombre, à composer des samples assourdissants et du gros beat. Les lyrics? Baby I love you, come in my Bed? Raté. MC Dälek a des messages plus essentiels à faire passer (non pas que le sexe ne soit pas essentiel) : l'endoctrinement des religions, la surpopulation carcérale et tant qu'on y est, l'état lamentable du hip hop lorsque paraît Absence (2004), leur deuxième album (ou troisième si l'on compte l'EP Negro Necro Nekros). Signé depuis 2002 sur le label Ipecac de Mike Patton (ex-FAITH NO MORE et Mr. BUNGLE, actuellement chez FANTOMAS), Dälek et ses potes Oktopus et Still n'ont cessé de proposer une musique novatrice, curieux mélange entre des textes revendicateurs dans la plus pure tradition du hip hop et une musique pesante, faite de samples de guitares distordues et de sonorités industrielles comme pour mieux expliciter la noirceur du chant.

Still, Dälek et Oktopus
Absence est un condensé de cette rage qu'on retrouve même dans les titres des chansons (A Beast Caged, In midst of Struggle) et qui est nécessaire si l'on souhaite modifier les mentalités, cesser de faire l'apologie de l'argent (Culture for Dollars) et des religions (Opiate the Masses). Distorted Prose donne le « la » avec une intro a cappella, une contrebasse mingusienne et ces samples furieux qui font soudain leur apparition. Dès lors, DALEK ne lâchera plus prise. La rythmique obsessionnelle et sourde nous maintiendra sans cesse au sol, si ce n'est pour les deux plages instrumentales que sont Absence et Köner, évoluant dans un registre plus atmosphérique. Une efficacité terrible dans ce phrasé debonnaire mais entêté, dans ces larsens qui nous lacèrent les tympans et les scratches de DJ Still qui viennent souvent agrémenter les intermèdes et donner un côté plus free style proche des BEASTIE BOYS ou des X-ECUTIONERS. A l'instar d'un RAGE AGAINST THE MACHINE, DALEK possède ici un gros défaut (peut-être le seul) : les titres sont tous les mêmes. Bien entendu, c'est comme ça pour tout le monde, que ce soit Francis Cabrel ou GREEN DAY, mais en l'occurrence, cette succession de tracks aux structures identiques est vraiment trop flagrante pour qu'on n'en dise pas un mot. Le talent de DALEK aura cependant été de nous proposer des morceaux qui ont indiscutablement un gimmick les rendant tous marquants. Se sentant probablement enfermé dans cette mouvance, le groupe a également eu le culot de s'orienter vers des contrées plus mélodieuses et instrumentales avec l'album suivant, Abandoned Language, et laisser de côté ce capharnaüm qui représentait alors sa marque de fabrique et lui a valu la description d'hybride entre du hip hop engagé et des groupes rock bruitistes comme MY BLOODY VALENTINE et FAUST.
This heart filled with rancor
resurrected by this modern Rome
Where hate's condoned
Inherent anger strangles what night has shone
Found shelter when consciousness faltered
We've all been offered as Abraham's son on ruined Altar
(DALEK, A Beast Caged)
DALEK – Absence (Ipecac Recordings, 2004)
WWW...
le myspace de DALEK avec Eyes to form Shadow en écoute
Le clip de « Ever Somber »