La Cité Interdite : sauvé par la Gong (Zhang Yimou, 2007)
Il y a quelque chose de pourri au royaume des Tang ces derniers jours. L'Empereur (Chow Yun-Fat), fraichement de retour au bercail après une bataille forcément sanglante, retrouve sa femme (Gong Li) qui semble peu réjouie de le voir. Il faut dire que celle-ci a trouvé en Wan, son beau-fils né d'un précédent mariage de l'Empereur, une épaule à caresser et prête à la consoler. Ce dernier n'est par ailleurs pas insensible aux charmes de Chan (Li Man), une servante aussi appliquée que délicieuse. Mais le monarque n'est pas dupe : avec le concours du médecin impérial - dont Chan est la fille - il va tester les vertus « démentielles » du champignon noir sur sa pécheresse de femme qui, pensant recevoir chaque jour un médicament pour soigner une prétendue maladie, va voir ses facultés mentales décliner lentement. L'arrivée du prince Jai (Jay Chou) remettra peut-être les choses en place.
"- Il a pas l'air bon, ce jus de champignons, chéri!
- Mais si... il est délicieux, et c'est moi qui l'ai préparé en plus!"
Le décor de La Cité Interdite est planté. Cette nouvelle fresque historique de Zhang Yimou, après Héro et Le Secret des Poignards Volants, reprend les bases du wu xian pian, le film de sabres traditionnel chinois. Le réalisateur nous dépeint les couloirs calmes et fastueux de la cité impériale, ses manigances et ses trahisons. Avec un rythme de sénateur, il va tisser cette intrigue sur fond de secrets familiaux et de rapports de force. Magnifiquement mise en scène (malgré les images de synthèse pour certains plans larges), cette épopée bénéficie surtout de l'excellente prestation des acteurs, parmi lesquels on citera en premier lieu Gong Li, tant elle passe avec aisance d'une attitude contenue à une rage folle, explicitant à merveille cette flamme qui brille sans cesse dans ses yeux noirs : le désir de renverser son despote de mari. A l'image des ninjas, les scènes de combat sont filmées avec efficacité et sobriété, même si plusieurs hectolitres d'hémoglobine couleront lors de cette lutte impitoyable. La bande originale, quant à elle, est tout à fait à l'image du film, se partageant entre des atmosphères feutrées mais toujours tendues, et des séquences plus grandiloquantes et héroïques. On saluera enfin le soin avec lequel ont été conçus les costumes, ce qui a valu plusieurs récompenses à La Cité Interdite.
Sans révolutionner le genre, Zhang Yimou nous livre un nouvel épisode brillant de l'histoire millénaire de la Chine impériale, où l'éternel respect des traditions et l'honneur cotoient, pour le meilleur et pour le pire, la soif de pouvoir et d'auto-détermination.
La Cité Interdite (Curse of the Golden Flower)
Chine – 2007
réalisé par Zhang Yimou
avec Chow Yun-Fat, Gong Li